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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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15 juin 1842

15 juin [1842], mercredi matin, 8 h. ½

Bonjour mon Toto bien-aimé, bonjour mon cher amour, comment vas-tu mon petit homme et comment va notre petit garçon [1] ? Je ne suis pas contente, mon cher adoré, j’espérais que cette consultation vous délivrerait tous d’inquiétude et que nous pourrions nous réjouir sans restrictions et sans la moindre préoccupation douteuse et pénible. Et voilà que cela nous laisse toujours dans la même position. Cependant, j’ai la certitude, moi, que notre pauvre petit garçon ne peut pas être malade dangereusement, et je sais dire que le mieux qui se produit de jour en jour est la vraie et la pleine guérison. Le jour où ma conviction sera corroborée par celle de M. Louis, je serai bien heureuse mais je voudrais que ce fût aujourd’hui car il y a trop longtemps déjà que nous attendons. Voici un temps d’ailleurs qui doit donner de la vie, de la joie et de la santé à ce cher petit convalescent. Je le prie de bien humer l’air, de bien manger, de bien appeler papa BÊTE ET GANACHE et de redevenir bien vite le plus beau et le plus charmant des gamins. J’aurais pu ajouter le plus FORT mais ceci n’est pas nécessaire tout de suite, attendu que c’est cette force et ce courage de petit cheval de collège qui nous a valu toutes ces inquiétudes et toutes ces angoisses depuis trois mois. D’abord la santé ; après il sera temps de penser à la science. Pauvre petit enfant bien-aimé, je vous aime. Vous ne le savez pas, mais je vous aime de tout mon cœur. Dépêchez-vous de vous guérir pour nous rendre tous bien heureux.
Mon cher petit homme adoré, si tu sors, viens un moment chez moi. Tu me diras comment va le petit garçon, comment tu vas toi-même et comment tu m’aimes.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16349, f. 143-144
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette


15 juin [1842], mercredi après-midi, 3 h. ¾

Décidément, mon Toto, ma perruque est enguignonnée [2]. J’ai vu le gros Ledon aujourd’hui et il n’y a rien de fait parce que, soit disant, la personne, la femme, qui compose le philtre est à la campagne pour trois ou quatre jours et qu’il faut attendre qu’elle soit revenue pour en avoir. Elle ne reviendra que pour lundi. Du reste j’en ai vu un échantillon sur la hure [3] de ce Merlan. C’est vraiment MERVEILLEUX [illis.] et autres superlatifs quand tu l’auras vu de tes propres yeux, tu ne voudras plus autre chose. Toujours est-il que me voici reculée de nouveau jusqu’à lundi et par cette chaudeur ce n’est pas très régalant. Comment vas-tu, mon petit Toto, [avez-vous écrit  ?] ? Comment allez-vous mes chers petits amoureux ? Je me fais cette question vingt fois par minute. Je voudrais bien que vous veniez pour donner enfin une bonne réponse. Vous n’avez pas d’académie aujourd’hui, vous n’avez pas d’excuse du tout, vilain méchant, pourquoi ne venez-vous pas alors et pourquoi ne me faites-vous pas sortir ? Sans reproche, voilà bien longtemps que vous ne m’avez fait voir le soleil et que vous ne m’avez montré votre [illis.]. Je désire que cet état de chose cesse le plus tôt possible, entendez-vous, mon cher petit homme adoré. Et puis baisez-moi et venez bien vite, je suis très pressée de vous voir et de vous caresser des pieds à la tête.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16349, f. 145-146
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette

Notes

[1François-Victor, fils de Victor Hugo, se remet d’une maladie.

[2Juliette, depuis quelque temps, se désole d’avoir des cheveux blancs, et cherche à les teindre.

[3Hure : Tête de bêtes fauves et de poissons.

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