16 mai 1860

Guernesey, 16 mai 1860, 8 h.

Bonjour, mon doux adoré, bonjour de tout mon être à la fois, bonjour et amour. Je continue à me sentir très bien de mon bain. Quoique j’aie très peu dormi. Mais cela m’arrive presque toujours d’être agitée la nuit qui suit le bain. Autrement je vais très bien ce matin et si je reste encore au lit c’est pour me reposer et surtout pour ne pas allumer de feu. Mais toi, mon cher bien-aimé, comment as-tu passé la nuit ? As-tu bien dormi ? Ta chère tête, comment va-t-elle ce matin ? Tu es sans aucun doute déjà au travail depuis longtemps ? Tâche de ne pas trop te fatiguer et de ne pas aller au-delà de tes forces. J’attends avec impatience le moment où tu te remettras au travail. Tu ne peux te figurer autant que cela est le bonheur que je me promets de refaire connaissance avec tout ce monde de ta pensée non seulement pour le plaisir de l’admiration mais encore et surtout parce qu’il me semble que je vis plus près de toi, que je pénètre plus avant dans ta pensée et dans ton cœur. Aussi ce sera une véritable fête pour mon âme le jour où tu me rendras ma copire. Jusque là je t’aime dans mon petit coin et à petit bruit pour ne pas te distraire dans ton œuvre sublime et je baise ton divin front avec adoration.

BnF, Mss, NAF 16381, f. 113
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette