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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Paris, 9 juin [18]72, dimanche matin, 6 h. ½

Bonjour, mon bien-aimé, bonjour, aussi, mon bien endormi, car j’espère que tu n’as pas fait comme moi la bêtise de passer ta nuit blanche. Saint Médard qui avait manqué son train hier nous arrive aujourd’hui avec son chargement de quarante jours de pluie ; pas une minute de plus, pas une goutte de moins, c’est dans le règlement. Au reste, pour le bénéfice que nous tirons toi zé moi du beau temps et de la pluie, peu importe le programme du baromètre. Ce qui m’embête, c’est que la pauvre Suzanne continue d’être souffrante malgré son courage et son énergie de bête de somme. Moi-même je plie sous le faix de l’âge et de la vie que nous menons ici depuis huit mois. Peut-être en aurait-il été de même partout ailleurs et dans d’autres conditions, c’est possible, mais la vérité est que je suis complètement éreintée et finie maintenant. Cette fin, non gratuite mais obligatoire et laïque (ad libitum) – c’est le cas de montrer mon latin à défaut d’autre chose – me serait indifférente si je ne sentais pas que tu en ressentiras le contrecoup. Aussi, mon pauvre grand bien-aimé, je lutte, comme le pourpoint de don César [1], mais pas avec le même succès que lui, hélas ! Cependant je me sens au cœur la jouvence des jouvences : l’amour et jamais je ne t’ai plus ni mieux aimé qu’à présent.

BnF, Mss, NAF 16393, f. 160
Transcription de Guy Rosa

Notes

[1Dans son monologue de l’acte IV de Ruy Blas, don César dit : « Mon pourpoint m’a suivi dans mes malheurs. Il lutte. »

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