Guernesey, 22 juillet, [18]70, vendredi matin, 6 h.
Bonjour, mon cher grand bien-aimé. Comment as-tu passé la nuit ? Bonne, n’est-ce pas ? Moi j’ai décidément mal à une grosse dent. Il faudra que je la fasse arracher le plus tôt possible pour me débarrasser de ce mal hargneux et agaçant. C’est une bonne, généreuse et pieuse idée que tu as euea hier de faire appel aux femmes de Guernesey, c’est-à-dire du monde entier, car ta voix porte aux extrémités les plus reculées de la terre, en faveur des blessés, hélas ! trop certains, français et prussiens [1]. Pour ma part, je donnerai tout le vieux linge que j’ai, y compris celui qui t’a servi dans ton anthrax [2]. C’est à ces dames à faire à Hauteville [3] le plus de charpie qu’elles pourront. Moi-même je m’y emploierai de tout mon cœur, mais le soin de tes hôtes ne me laisse guère le temps de faire autre chose [4]. Enfin je ferai ce que je pourrai. Le temps est toujours brouillardeux et trop chaud, pour moi, du moins. Qu’en dit Petit Georges et qu’en pense Petite Jeanne ? Moi je sais que je vous adore Tous, Tous, Tous !!!
BnF, Mss, NAF 16391, f. 199
Transcription de Anne-Estelle Baco assistée de Florence Naugrette
a) « eu ».