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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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5 novembre [1839], mardi matin[ ?] 11 h. ½

Bonjour, mon Toto chéri. Tu n’es pas revenu, mon pauvre adoré, et je devine bien pourquoi. Tu as travaillé toute la nuit. Ainsi travail le jour, travail la nuit, tu n’as pas un moment de repos et moi pas un de sécurité, car chaque fois que ma pensée se reporte sur toi je tremble que tu ne tombes malade. Ce n’est pas pour parler [que] je te dis cela, mon adoré, mais parce c’est ma préoccupationa et ma crainte de tous les jours et de toutes les nuits. Avec ça que vous avez eu la paresse de ne pas vouloir mettre vos petites bauttes hier. J’aurais dû l’exiger mais soyez tranquille, si vous venez tout à l’heure je vous les mettrai de force. La bonne arrive de chez Mmes Triger et Pierceau. La pauvre mère Pierceau est triste et souffrante et désire que j’aille la voir. Si tu peux nous y conduire, je ne demande pas mieux. J’ai payé la bonne tout à l’heure, demain ce sera Gérard qu’il faudra que je paie. Je ne sais pas comment je fais, je dépense un argent fou et cependant je ne m’achète aucune futilité que les femmes ont coutume de se [donner  ?] et je fais attention autant que je peux à toute ma maison. Cependant ce qui se dépense d’argent chez moi est vraiment effrayant. Je voudrais que tu emportasses la boîte, cela te ferait un soulagement et à moi aussi car je souffre de cet état de chose beaucoup plus que je n’ose te le montrer. D’ailleurs je n’en ai pas le moindre besoin, elle n’est pas jolie, ainsi il n’y a aucun mérite ni aucun sacrifice de ma part mais il y [a aura  ?] de la confiance et de la bonté de la tienne. Donne ta petite main, mon adoré. Pense que je t’aime, mon chéri. Aime-moi et aidons-nous, c’est-à-dire laisse-moi faire la mouche du coche autour de ce lourd chariot auquel tu es attaché. Je t’adore, mon Toto.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16340, f. 15-16
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « préocupation ».
b) « emportasse ».


5 novembre [1839], mardi soir, 6 h.

Pas encore venu, mon adoré, et moi qui ai tant besoin de vous voir. Pourvu que vous n’ayez pas été vous promener de ce temps-ci avec vos BAUTTES à jour. Je suis très tourmentée et très impatiente de vous voir. Je voudrais savoir si on donne Marion aussi ce soir, non pas que j’espère y aller mais pour vous surveiller et vous prier de ne pas vous diriger de ce côté-là. Je vous aime, baisez-moi. Je regrette de ne vous avoir pas forcé à mettre vos bottes neuves cette nuit au risque de vous forcer en même temps à mettre votre pauvre vieille Juju que vous laissez trop souvent accrochée autre part qu’à un clou, ce qui lui fait prendre de mauvais plisa. Vous êtes un vieux bêtab si vous ne comprenez pas le sens de cette parabole non tirée de l’Évangile.
J’ai eu Mme Laporte la couturière tantôt, elle m’a essayé ma robe qui ira bien je l’espère. Quantc à l’étoffe, elle regrette que je n’aie pas eu l’idée d’en apporter trois ou quatred qu’elle m’aurait très bien placée à vingt ou trente sous par aune de bénéfice. Elle prétend que la soierie est hors de prix ici et que ma levantine est maNIfique. Moi je suis très contente de l’avoir sans autre bénéfice que celui d’avoir une bonne et belle robe dont j’aurai très soin. Merci Toto, merci, mon adoré. Je t’aime… tu es bon comme le Bon Dieu. Je veux que tu me le prouvese encore ce soir en mettant tes bottes comme un lion. En attendant, viens le plus vite possible, je suis très pressée de te voir et de te baiser. Soir pa. Soir Man. Tout le monde ici vous adore, y compris Suzanne qui est amoureuse de vous. Moi je vous aime comme jamais on n’a aimé depuis la création.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16340, f. 17-18
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « pli ».
b) « bêtat ».
c) « Quand ».
d) « quatres ».
e) « prouve ».

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