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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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9 juillet [1839], mardi matin, 10 h.

Bonjour mon cher petit bien-aimé, bonjour mon petit Artaban. Nous verrons tantôt si vous êtes toujours aussi vaillant qu’hier. J’en doute, au risque de jurer devant la Reine [1]. Nous verrons aussi si vous me ferez sortir une fois que je serai habillée, ce qui sera bientôt. Je veux découdre une à une vos blagueries mirifiques. Et je rétablirai dans toute son intégrité votre ANCIENNE réputation, celle dont Mme Dorval faisait si bien les honneurs. Voime, voime, ce sera bien fait et vous n’aurez que ce que vous méritez. Ça vous apprendra à faire le pourfendeur chaque fois qu’il n’y a rien à fendre ni à pourfendre. Il fait un temps comme je l’aime, aujourd’hui, pas froid, pas trop chaud. Nous verrons si vous m’en ferez profiter. Je vous aime, Toto. Je vous aime mon petit homme de tout mon cœur et de toute mon âme. Aimez-moi et pensez à ce que je vous ai dit hier au soir, c’est plus qu’un pressentiment, c’est une certitude qui me vient de certains phénomènes qui se passent en moi et qui ne peuvent pas me tromper. Et puis baisez-moi qu’on vous dit. Tout ce qui vivra de moi vous aimera toujours où que ce soit : en bas, en haut, ici ou là-bas, sur la terre ou dans le ciel, je vous aimerai. Baisez-moi en attendant, c’est la plus douce et la meilleure des occupations.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16339, f. 89-90
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse


9 juillet [1839], mardi soir, 8 h. ¼

Je suis deux fois plus triste qu’à l’ordinaire, mon Toto, de ce que nous avons eu une espèce de discussion pour une chose qui de toute façon n’aurait pas dû en susciter entre nous. Au reste, maintenant, je ne veux plus entendre parler de quoi [que] ce soit dans mon intérieur puisque je réussis si mal même quand je me résigne. Je pensais que tu reviendrais chercher le parapluie de Mme Pierceau pendant qu’il pleuvait et j’aurais profité de cela pour vous embrasser comme il faut et pour prendre un peu de courage dont je manque tout à fait. J’ai prévenu Mme Pierceau pour l’argent de Mme Krafft. Au reste le petit incident de ce soir ne contribuera pas à avancer notre liquidation. Voilà ce que c’est que le mauvais exemple, vous perdez deux bourses, il est bien juste que j’en perde au moins une. J’espère cependant que cet événement, tout malheureux qu’il est, ne me fera pas perdre mes ARRHESa à la diligence. Dans tous les cas, ce sera aussi juste et aussi bien trouvé que le reste… mais parlons d’autre chose. Je voudrais que tu ne vinssesb pas me chercher trop tard ce soir. Je suis tellement triste et maussade que c’est une conscience que de me laisser chez cette pauvre femme qui n’est pas la cause de ce qui m’arrive ou de ce qui ne m’arrive pas. Ainsi tu serais bien aimable de venir bientôt me prendre.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16339, f. 91-92

Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Jean-Marc Hovasse

a) « arres ».
b) « vinsse ».

Notes

[1On ignore à quelle pièce il est ici fait allusion.

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