Guernesey, 16 juillet [18]68, jeudi, 6 h. du m[atin]
Il y a déjà longtemps que je suis levée, mon cher bien-aimé, mais j’ai attendu que six heures soient sonnéesa avant d’ouvrir mes portes par égard pour la vieille Suzarde et la jeune Thérèse [1]. Mon premier soin en sortant de ma chambre a été de regarder ton signal et de lui envoyer un tendre bonjour qu’il ne m’a pas rendu, le méchant sourd-muet qu’il est, ce qui ne m’a pas empêchée de lui demander comment tu as passé la nuit et s’il y a longtemps que tu es levé et si tu m’aimes malgré la présence de la fameuse dame aux trucs et aux pâtés de foie gras [2]. Quant à moi qui n’ai ni trucs, ni homme, ni truffes, vous suffisez à mon bonheur et je n’en demande pas davantage pour le reste de mes jours ici-bas et pour toute mon éternité là-haut. Tant pis si cela vous embête.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 197
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « six heures soient sonnés ».