7 juillet [1840], mardi après-midi, 3 h.
Je suis bien contente, mon cher bijou, d’avoir fini avec Chapelle, je voudrais bien pouvoir en dire autant de l’affaire de Mme Krafft qui traîne outre mesure. Tu dois cependant sentir, mon Toto, à quel point j’ai raison de désirer d’éteindre une dette toute de complaisance et de bonne grâce qui dure depuis une année. Tu es trop juste pour ne pas sentir comme moi et tu devrais bien faire un effort sur ta préoccupationa, sur ta paresse et sur tes fonds secrets pour acquitter cette vieille dette. Il te suffit d’écrire à un gaillard ou à un rampin [1] quelconque d’envoyer les livres chez le relieur en le prévenant que c’est pour toi et en nous promenant nous porterions l’exemplaire modèle chez le relieur. Je peux toujours, en attendant le prix exact de la robe [2], payerb les 7 f. d’emballage et de façon. Enfin, mon cher adoré, tire-moi cette épine du pied le plus tôtc possible, tu seras bien bon et je t’en serai bien reconnaissante. Il fait un temps ravissant maintenant et je m’abonnerais bien à sortir avec vous pour tout le reste de la journée. Je vous aime Toto, je vous ai fait une belle ceinture. Je vous ai dérouillé votre instrument et vous ne m’avez pas donné un pauvre petit liard pour ma tirelire, c’est très vilain de votre part et une autre foisd je ne vous ferai plus rien. Vous porterez vos zaillons et votre panoplie où vous voudrez, je ne fourbirai ni l’une ni je ne raccommoderai les autres sans argent. Baisez-moi vieux scélérat et tâchez de ne pas aller à Saint-Prix [3] avec votre air de sainte Nitouche. Je vous crois capable de tout en général et du voyage de Saint-Prix aujourd’hui en particulier. Je vous adore mon bon petit homme. Vous avez fait un beau dessin à ma péronnelle [4] et qui me servira à faire faire ma broderie pour mon lit. Baisez-moi encore je vous dis que je vous aime de toute mon âme et que vous le méritez bien.
Juliette
BnF, Mss, NAF, 16343, f. 15-16
Transcription de Chantal Brière
a) « préocupation ».
b) « payé ».
c) « plutôt ».
d) « autrefois ».