Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1840 > Juin > 18

18 juin 1840

18 juin [1840], jeudi après-midi, 3 h. ½

Je t’aime mon cher petit homme, je t’envoie tout mon cœur et toute mon âme dans une pensée. Il est probable que tu es avec ton cher petit Toto [1] ? C’est bien naturel et il est bien naturel aussi que je regrette de ne pas être entre vous deux en ce moment. Baise-moi mon Toto je t’aime. Comment vont tes reins ? Les miens sont toujours dans un état hideux, je ne prends pas de bain parce que j’attends Mme Pierceau qui selon sa louable inexactitude ne viendra pas. Elle sera en outre cause que je n’aurai pas de chocolat à te donner aujourd’hui ni demain, ce qui me contrarie on ne peut pas plus. Je déteste les gens inexacts, c’est le pire des défauts, selon moi, et je donnerais de bon cœur ceux qui l’ont au diable. Je t’en excepte, bien entendu, car toi tu es un pauvre ange sublime qui nous fait trop d’honneur de daigner penser à nous quelquefois. Mais tous ces affreux muflesa qui sont bêtes comme des oies, sous quel prétexte ne tiennent-ils pas leur promesse ? Mais en voilà assez de dit là-dessus. En somme si cela ne m’empêchait pas de prendre un bain, dont j’ai grand besoin, et si cela ne te privait pas de ton chocolat quotidien je m’en ficherais supérieurement. Il fait assez beau aujourd’hui, seulement un peu de vent. J’irais bien me promener avec toi n’importe où et je suis sûre que cela me guérirait. Baise-moi mon Toto chéri, je vous dis que je t’aime. Je vais marquer mes fameux bas. Je ne peux pas faire mes chemises puisqu’elles ne sont pas taillées. Je voudrais que tu m’apportassesb de la copie. Il me semble que je ne fais pas trop attendre et que cela mérite récompense en m’en donnant tous les jours à faire ? Tâchez aussi, mon cher petit homme, de n’être pas trop longtemps sans venir, il me semble qu’il y a déjà vingt-quatre heures que je ne vous ai baisé. Je vous aime, entendez-vous ?

Juliette

BnF, Mss, NAF 16342, f. 217-218
Transcription de Chantal Brière

a) « muffles ».
b) « m’apportasse ».

Notes

[1Il s’agit de Victor, le fils cadet.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne