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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 18 décembre [18]63, vendredi matin, 9 h.

Bonjour, mon doux adoré, bonjour, et bonheur si tu as passé une bonne nuit. Quant à moi j’ai fait la paresseuse ce matin pour le plaisir de faire la paresseuse : L’ART POUR L’ART. Cela m’a si bien réussi que je me promets de recommencer plus souvent ce système de dorloterie fainéant. Ta SIXTYa sort de chez moi emportant deux œufs frais de ma réserve pour achever de coller ton vin. Je lui ai fait une petite morale sur son sans-gêne à l’endroit de ses sorties nocturnes et de son dîner dans la salle à manger, tout cela étant assez véniel du reste d’après sesa explications. Cependant elle est avertie qu’elle doit te demander la permission s’il te convient qu’elle use de la table, même dans [illis.] l’intention d’économiser le charbon de la cuisine, et qu’elle ne doit pas se permettre de rentrer à des heures indues le soir si elle veut conserver son droit de critique sur les infractions des deux autres jeunes servantes. Tout cela, je te le répète, est très peu de chose et ne ferait pas fouetter un chat. Le plus gros de son histoire c’est qu’elle me supplie de signer la fameuse pétition (annuelle) pour la conservation de la petite ÉGLISE menacée sans cesse dans son existence par la MÉTROPOLE catholique. Je m’en suis défendue par cet argument que je n’allais à aucune église et que je ne pouvais prendre parti ni pour l’une ni pour l’autre mais cette raison l’a peu convaincue et elle [répond  ?] à cela qu’il n’est pas [nécessaire  ?] d’être catholique pratiquant mais seulement FRANÇAIS pour que la signature [compte  ?]. Pour m’en débarrasser je lui ai promis de te consulter tantôt quand je te verrai et de suivre ton conseil quel qu’il soitb. En voilà bien long pour pas grand’chose, mon cher petit homme, mais tout ce remplissage n’est que la litière de mon amour qui s’y blottit même dans les mots les plus insignifiants. Je t’adore, mon grand bien-aimé, et ma respiration te dit dans l’air, mon regard dans tout ce qu’il voit, ma bouche dans ce qu’elle dit, ma pensée dans tout ce qu’elle contient, mon cœur, mon âme, tout mon être répète : je t’aime.

BnF, Mss, NAF 16384, f. 286
Transcription de Gérard Pouchain


a) « SIXTI ».
b) « ces ».
c) « quelqu’il soit ».

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