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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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19 juin 1862

Guernesey, 19 juin 1862, jeudia matin, 6 h.

Je t’approuve, mon doux adoré, de n’être pas encore levé quand bien même tu aurais dormi comme un noir [1] depuis le moment où tu t’es couché jusqu’à présent. Dors, repose-toi pendant que je pense à toi et que je t’adore.
J’ai passé une excellente nuit et je vais très bien. Je suis donc prête et archiprêteb à partir. Seulement le temps ne me paraît pas encore aussi à point que moi. Peut-être le sera-t-il demain, c’est ce dont tu seras bon juge. Quant à moi, je m’en rapporte entièrement à ton expérience nautique et je ferai ce que tu voudras, quand [tu] voudras et comme tu voudras. EST-CE CLAIR ? J’ai oublié de m’entendre avec toi pour la boisson de mes chambrières. Il est impossible qu’elles ne boivent que de l’eau pendant trois ou quatre mois et je sais par expérience qu’il est difficile de laisser de la bière à la disposition de Suzanne ; d’autre part, ton vin est trop précieux et trop cher pour le leur donner. J’ai donc pensé à leur en faire acheter chez [Cadic  ?] au fur et à mesure de leur besoin, du pareil au tien et au même prix. Bien entendu si tu y consens. Je tâcherai de t’en parler tantôt. En attendant je me grise de mon amour : à ta santé !

BNF, Mss, NAF 16383, f. 156
Transcription de Camille Guicheteau assistée de Guy Rosa

a) Juliette Drouet a écrit « mardi », corrigé sur le manuscrit d’une autre main que la sienne.
b) « archie prête ».


Guernesey, 19 juin 1862, jeudi soir, 7 h. ½

Je me suis réservée cette restitus pour ma soif de ce soir, mon doux adoré, afin d’occuper mes yeux autant que mon cœur en ton absence. Mais cette prévoyance, hélas ! ne m’empêche pas de sentir le vide que me fait ton absence. Quelque courte que soit la distance entre nous, il suffit que tu ne sois pas dans mon voisinage immédiat pour qu’un grand trou noir se creuse entre ma vie et la tienne. Cela ne m’empêche pas de regretter l’affreux temps qu’il fait en ce moment car cela va troubler votre petite fête en plein air et presque en plein océan et je crains que cela n’augmente ton mal de gorge, ce qui serait pour mon cœur un vrai désastre. Tâche, mon trop bien-aimé, de te garantir de toute humidité et rapporte-moi ta chère santé aussi entière et aussi saine que ton amour. En attendant, je t’aime, je te souris, je t’adore, je te bénis !

BNF, Mss, NAF 16383, f. 157
Transcription de Camille Guicheteau assistée de Guy Rosa

Notes

[1Juliette parodie sa servante Suzanne, qui déforme ainsi l’expression « dormir comme un loir ».

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