30 mars 1862

Guernesey, 30 mars 1862, dimanche matin, 7 h. ½

Bonjour, mon toujours plus en plus aimé, bonjour de mon lit à ton lit, où tu as encore et bien dormi, je l’espère, et où je reste, non pour dormir, mais pour m’y dorloter en attendant que le feu soit allumé et que mon déjeuner soit prêt. Le temps est si humide et maussade qu’un peu de paresse est de circonstance ; mais ne va pas croire pour cela que je suis malade et que j’ai passé une mauvaise nuit, au contraire, car je me porte très bien et j’ai très bien dormi. Je souhaite que tu sois dans le même état de santé et de good nuit. En attendant que tu m’en apportes la bonne nouvelle toi-même tantôt, je me toutonne [1], je me ronronne, je me moutonne dans mon dodo et je vais y lire les journaux ! Attrapé^a ! À propos de journaux, tu as dû remarquer hier que Marquand était rentré pour me parler dans la salle à manger ; il voulait me raconter l’affaire couvre-pied-Duverdier. D’après ce qu’il m’en a dit, le malentendu ne serait pas aussi fâcheux que le prétendait le citoyen Kesler mais dans tous les cas, on doit envoyer chez moi aujourd’hui ce susdit couvre-pied pour que tu le voies et que tu l’achètes s’il te convient au prix coûtant de deux livres 10 shillings. Voilà, maintenant tirez-vous de là comme vous pourrez, moi je vous aime sans marchander.

BnF, Mss, NAF 16383, f. 78
Transcription de Marie Legret assistée de Florence Naugrette

a) « Attrappé ».