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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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28 mars 1839

28 mars [1839], jeudi après-midi, 1 h.

Bonjour mon Toto chéri, comment vas-tu, mon cher petit homme ? Je suis inquiète de ton indisposition de cette nuit. Je voudrais te voir pour m’assurer que ce n’est rien. C’est déjà bien trop triste d’être séparée de toi sans y ajouter le tourment de te savoir souffrant. Tu devrais sentir cela et venir tout de suite.
J’ai passé une nuit indigne. Ce matin, je suis toute courbaturée, cependant j’espère que lorsque je vais me lever et me débarbouiller, il n’y paraîtra plus. J’avais chargé Mme Pierceau de m’avoir des épiceries qu’on a meilleures dans son quartier et moins chères que dans le mien. Mais aussi cela m’a ruinée et je n’ai plus que quelques malheureux sous couranta tristement les uns après les autres. Si tu peux m’avoir un peu d’argent pour arriver jusqu’aux appointements, si appointements il y a encore à la caisse Joly, sans travailler la nuit comme tu fais toujours, tu me feras plaisir. Si nous pouvions trouver à vendre quelque chose, cela nous soulagerait d’autant. Et à propos de vente et d’achat, j’ai une charmante petite bague bleue que je vais faire mettre à neuf pour Mlle Dédé. Si elle est grande et généreuse, comme je l’espère, elle me rendra présent pour présent. Si elle ne l’est pas, comme c’est probable, je l’humilierai par magnificence et voilà tout, nous n’en serons pas moins bons amis pour ça. Je vous aime vous, je voudrais vous voir. Je suis tourmentée de vous savoir malade. Je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 313-314
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « courrant ».


28 mars [1839], jeudi soir, 7 h. ¾

Je souffre, mon Toto, c’est pas ma faute et il ne faut pas m’en vouloir si je ne sais pas mieux porter la souffrance. Mais je t’aime, mon cher bien-aimé, voilà ce qu’aucune douleur ne me fera jamais oubliera. Je t’aime. Et mon plus grand mal, c’est de ne pas te voir assez. D’ailleurs maintenant le peu de temps que tu passes avec moi est toujours consacré à lire ou écrire, il n’y a plus pour moi de ces heures d’amour comme autrefois où tu étais tout à moi. Je sais bien que tu travailles mais je sais encore que tu ne m’aimes plus d’amour. Si je me trompe, ce que je désire, la faute ne serait pas à moi, mais à toi car tu fais tout ce qu’il faut pour me prouver que tu n’es plus amoureux. Quantb à l’amulette de la petite fille, il va sans dire que je lui donne la bague sans condition et du meilleur de mon cœur. D’ailleurs tant mieux pour elle si elle a déjà le sentiment de la propriété développé, c’est une garantie pour l’avenir. Et puis j’aimerais mieux une pensée d’amour de toi que toutes les amulettes du monde. Je t’aime, je souffre, je suis triste, et peut-être injuste, je le désire sans oser l’espérer. Tâche de venir dîner tantôt, maintenant que j’ai un dîner qui peut t’être offert.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 315-316
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « oublié ».
b) « Quand ».

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