Paris, 30 mars 1882, jeudi matin, 10 h.
J’espère, mon grand petit homme, que tu n’as pas eu besoin de ton Élatine [1] cette nuit car je ne me pardonnerais pas d’avoir dormi d’un sommeil si lourd et si profond que je n’ai pas eu conscience un moment de ce qui s’est passé dans ta chambre de toute la nuit. Ce matin quand je me suis approchée de ton lit tu dormais et je n’ai pas eu le courage de te réveiller pour t’offrir à boire. Depuis j’ai ouvert ta porte deux fois sans attirer ton attention ce qui m’a prouvé que tu dormais encore. Au reste il fait un temps pluvieux et lourd qui provoque à la somnolence, et j’ai beaucoup de peine à m’en défendre moi-même en ce moment. Cela ne m’empêche pas de penser que tu as sénat à deux heures. Tu feras bien de ne pas l’oublier de ton côté parce que voilà déjà plusieurs séances que tu as brûlées. En attendant je me prépare déjà à celle-ci. Mme Lockroy a fait demander son déjeuner pour onze heures et demie afin de pouvoir s’occuper d’habiller ses enfants pour le bal costuméa que Mme Kestner [2] donne tantôt aux enfants de ses amies et aux siens. Moi je t’adore. Voilà.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16403, non folioté
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette
a) « costumé ».