Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1846 > Janvier > 21

21 janvier [1846], mercredi soir, 4 h. ½

Cher bien-aimé, j’ai été si souffrante toute la matinée et à présent encore que je n’ai pas pu t’écrire. J’ai des douleurs d’entrailles que je ne sais à quoi attribuer. Je suis pourtant allée à ce bout de l’an nonobstant mon mal. Seulement j’ai traîné jusqu’à présent à faire mes affaires et à t’écrire. Du reste, cher adoré, tu as joliment bien fait de m’avertir de ne pas me fier à l’heure indiquée. Je suis allée à midi et revenue à [illis.]. En rentrant chez moi la cuisinière de [M. Burgot  ?] m’a remerciée au nom de sa maîtresse avec une sorte d’effusion qui prouverait que ma démarche a fait plaisir. Je suis très contente que ça soit fait car toutes ces choses-là m’effarouchent toujours beaucoup.
J’espérais te trouver à la maison en rentrant, mon cher petit bien-aimé. J’avais fait ton eau [1] avant de partir pour n’être pas en retard. Ma précaution n’a servi à rien. Probablement il y a Chambre aujourd’hui et je ne te verrai qu’après la séance. Pourvu que tu viennes encore. Tâche de venir, mon Toto chéri, car j’ai bien besoin de te voir, je sens que je serai triste et malheureuse jusqu’à ce que tu sois venu. Tu sais que je n’ai pas gagné à la loterie mais il me reste deux bons billets et j’amènerai ROBERT. ATTRAPÉ. Part à moi seule, tu n’en auras pas, Nicolas [2]. Si tu veux être copié, il faudra me donner une culotte toute neuve et bien conditionnée en échange sinon NON. Je n’ai pas revu cette dame d’avant-hier. Elle paraissait pourtant bien pressée. Comme elle voudra. Ce sera une corvée de moins pour toi. Je suis bien souffrante et bien blaireuse mon Toto et je m’en aperçois à la recrudescence de stupidité qui s’empare de moi. Peut être ferai-je bien de laisser passer toutes ces coliques et de ne t’écrire qu’après, mais j’aime mieux t’écrire à présent pour tromper mon mal et mon impatience. J’ai plus pitié de moi que de toi. Comme tu vois, je pratique avec naïveté la maxime de : charité bien ordonnée commence par soi-même. D’ailleurs la différence d’un peu plus ou un peu moins de stupidité n’est pas assez importante pour que tu songes à le remarquer. Je te baise autant de fois qu’il y a de secondes jusqu’au moment où je te verrai.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16362, f. 67-68
Transcription d’Audrey Vala assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Victor Hugo avait des problèmes ophtalmologiques et venait souvent baigner ses yeux chez Juliette.

[2Citation à élucider.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne