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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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14 février [1848], lundi matin, 9 h. ½

Bonjour, mon doux petit homme, bonjour, je t’aime. Je te donne ma pensée, mon cœur, mon âme dans un baiser. Comment vas-tu ce matin ? As-tu bien dormi ? Il fait un temps à dormir tout debout mais ce n’est pas toujours une raison pour dormir dans son lit. À preuve que je n’ai pas fermé l’œil depuis 5 h. du matin et que dans ce moment-ci il me semble que je rêve. Tout à l’heure je me dégourdirai en faisant mon ménage, et s’il ne pleut pas tantôt je sortirai. Voilà le programme de ma journée si le temps le permet. Bien entendu que je serai revenue chez moi de trois à quatre heures selon l’heure à laquelle je sortirai. Je tâcherai que ce soit de bonne heure. En attendant je t’aime de toutes mes forces. Dites donc vous, on vous en donneraita des gants tout neufs pour les mépriser. Rendez-les moi et je vous donnerai les beaux que vous avez admirésb cette nuit. Ils sont très bons pour un Pair de France. Les autres ne sont que des PERLES et ne peuvent pas convenir à un …. académicien comme vous. Je ne tiens pas du tout à vous servir de monotype pour vous mouler des gants sur nature. Cela ne rapporte pas assez quoi que vous en disiez. Donnez votre pratique à qui vous voudrez, je n’y tiens pas. Pourvu que vous soyez aussi difficile avec les autres qu’avec moi, vous ne devez pas trouver facilement des fournisseurs. Voime, voime, une belle pratique, ma foi je m’en fiche. Encore si on se rattrapait sur les culottes. Ah bien ouiche c’est encore pire la culotte et on n’yc trouve même pas un verre d’eau claire à boire. Décidément on ne fait pas fortune avec vous.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16366, f. 63-64
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette

a) « on vous donnerai ».
b) « les beaux que vous avez admiré ».
c) « on y ».


14 février [1848], lundi midi

Le temps est bien maussade, mon Toto, et je suis encore plus maussade que lui, de sorte que je ne sais pas si je sortirai. Si je ne craignais pas de te déplaire, je resterais chez moi aujourd’hui. Mais dans le doute je me ferai violence et je prendrai mes jambes à mon [cou] et mon parapluie dans mes bras et j’irai voir les MOLLETS des PARISIENS. Ce sera un spectacle médiocre pour moi qui n’en fait pas usage. Il est vrai que, par compensation, vous admirerez les JARRETIÈRES des PARISIENNES, ce qui ne vous est pas tout à fait indifférent. Grand bien vous fasse mais prenez garde au revers de la main de Juju tombant d’aplomb sur votre nez. Je n’ai pas besoin que vous soyez si bien édifié sur la couleur des élastiques plus ou moins CAOUTCHOUC de ces DAMES. Je me passerai très bien de votre érudition à ce sujet et je vous prie de vous en tenir à la science des miennes, de JARRETIÈRE, pour ce que vous en faites vous n’en avez pas besoin davantagea. D’ailleurs je vous en donne l’ORDRE toujours de la JARRETIÈRE, et je vous prie de vous y tenir.
Voilà, tout ce que le temps et la moitié d’un rhume de cerveau me laisse de liberté d’esprit. Si vous n’êtes pas content de cela ajoutez-y du vôtre, voilà le seul remède que j’y vois et puis baisez-moi un peu, rien que pour voir aussi l’effet que cela me fera.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16366, f. 65-66
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette

a) « d’avantage ».

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