Paris, 29 août 1881, lundi matin, 8 h.
Encore une piètre nuit pour toi et pour moi, mon pauvre bien-aimé ; d’autant plus mauvaise que tu ne me parais pas, contrairement à tes habitudes, disposé à prendre ta revanche par une grasse matinée aujourd’hui. Tout cela n’est pas fait pour me faire oublier mon mal de tête qui va toujours de mal en pis. Heureusement que notre visite chez Rothschild nous forcera à sortir de bonne heure, ce qui fera, je l’espère, une heureuse diversion à nos bobos respectifs. Et à ce propos, il me semble, d’après notre lettre au directeur de la Banque Nationale, que tu as retrouvé le titre de mes trente-cinq actions nominatives ? Cette heureuse découverte nous dispense désormais d’avoir recours à l’obligeance un peu négative du bon monsieur Rouillon et je n’en suis pas fâchée. Parmi les choses sérieuses qui occupent ma pensée, il en est une que je voudrais voir partagée par toi, celle de la clôture décente des tombes jumelles de ma fille et de moi [1]. Ce soin t’incombe autant qu’à moi et il me serait doux de te devoir ce dernier service avant de quitter ce monde et de ne pas laisser ce soin à des indifférents. Penses-y. Tu trouveras, j’en suis sûre, que j’ai raison d’insister. Je t’aime.
Collection Claude de Flers (juin 2013)
Transcription de Florence Naugrette