Paris, 15 avril [18]77, dimanche matin, 11 h.
Bonjour, mon tout bien-aimé ; bonjour, à fleurs et à chants ; au printemps, à l’amour ; tout cœur et toute âme ; bonjour, je t’adore. Tu as bien fait d’éviter toute chicane avec la séquelle Lacroix, Simond et autres Simondices de la librairie et du journalisme [1]. « Tous ces gens-là seront peut-être un jour pendus, Ayons donc les égards pour eux qui leur sont dus [2] » en leur laissant fourrer leurs pattes immondes dans tes poches plutôt que de te salir les mains pour les en empêcher.
Autre guitare : et ta réponse aux francs-maçons de Lyon ? Pour peu que tu tardes encore un jour, il sera trop tard [3]. Tu as encore beaucoup d’autres lettres en souffrance, mais à quoi bon en parler maintenant ? Ce qu’il faut que tu saches, c’est que tu auras à payer le 20 de ce mois, dans cinq jours, une traite de vin de champagne, de vin de Médoc et de Madère montant à 1 309 F. 05. Mais je prends le parti d’aller te vider mon sac séance tenante, ce qui sera plus efficace que de te rabâcher tous les jours les mêmes choses. C’est bien assez de t’obséder de mon éternel amour. Est-ce vrai ? Qu’avez-vous à répondre ? Il est vrai que tu peux t’en dispenser car je le sais d’avance et j’en suis bien heureuse. Je t’a en bénis de toute mon âme et je vais aller t’a embrasser pour la peine.
BnF, Mss, NAF 16398, f. 105
Transcription de Guy Rosa
a) « l’ » qui n’offre pas de sens satisfaisant.