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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Paris, 9 avril [18]77, lundi midi

Je suis bien heureuse, mon grand bien-aimé, des bonnes nouvelles de tes chers petits enfants que je t’ai envoyées ce matin [1]. Le bonheur serait plus complet encore si nous partagions leurs douces joies, leurs surprises devant toutes les curiosités du voyage : mer, terre, ciel, oiseaux et fleurs. Ne pouvant pas tout avoir, il faut bien, mon divin papapa, nous contenter de la part qui nous est faite, jusqu’au jour où tu pourras mordre avec tes belles dents au gâteau de miel de tes chers petits affamés de vie et de bonheur. En attendant, regardons le printemps s’affermir sur ses étriers qu’il a déjà vidés bien des fois depuis sa rentrée officielle jusqu’à ce jour, sous forme d’averses, de grêle et d’ouragans. Et puis, dès que tu le pourras, tâchons de prendre nous-mêmes un peu de poudre d’escampette vers les Champs-Élysées et dans quelques cabarets voisins. Tel est le conseil très intéressé que te donne ma sagesse appuyée des raisons de santé dont je sens de plus en plus le besoin. Cela dit, fais-en le meilleur usage que tu pourras car, en somme, je m’en fiche pourvu que tu m’aimes et que je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 100
Transcription de Guy Rosa

Notes

[1Hugo en a pris note dans son Carnet : « Lettre d’Alice. Ils sont à St Jean de Luz. Les petits se portent bien et jouent. Ils sont heureux. Tout est bien. » On ne peut s’empêcher de préférer cette satisfaction, aux regrets de Juliette de ne pas avoir été du voyage.
Le surlendemain il répond à Alice :
« Chère Alice, vous êtes heureux tous, moi je suis content ; car je n’ai pas d’autre joie que celle qui me vient de votre bonheur. Vous regretter quand vous partez, vous espérer quand vous revenez, voilà l’occupation de mon vieux cœur. Et puis je travaille.
Je connais Saint-Jean-de-Luz. Quand je l’ai vu pour la première fois, j’avais neuf ans, un an de plus que Georges. C’était en 1811. Nous allions en Espagne. Allez-y, mais n’y faites pas de châteaux. Contentez-vous d’être aimée, c’est-à-dire heureuse.
Et revenez. Vous savez comme nous vous attendons. Il y a ici pour vous et pour nos chers petits, et pour votre cher Lockroy, quatre bras tout grands ouverts.
À bientôt donc, et tendre embrassement, chère fille. » (éd citée, p. 535-536)

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