Paris, 12 janvier 1880, lundi matin, 8 h.
Cher bien-aimé, je fais force de voile et de rame [1] pour doubler cette mauvaise crise qui me tourmente depuis plusieurs jours [2] mais sans succès jusqu’à présent. Je suis bien forcée de me l’avouer. J’espère pourtant qu’à force d’amour et de volonté je triompherai encore cette fois-ci de cette implacable tourmente. En attendant je me fais remorquer par ma restitus qui a le don de me ravigotera chaque fois que j’ai recours à elle. Je viens de recevoir des nouvelles de Mariette par Madame Allix qui envoie une nouvelle lettre du docteur Boucherot. Il conserve toujours l’espérance que la pauvre femme guérira mais il craint que ce ne soit un peu long. [3] Je joins ici sa lettre que tu liras toi-même, tu y verras qu’elle demande à voir Paul Meurice, probablement pour les actions qu’il lui a déjà rendues depuis longtemps ? Je crains que, par la suite, vous n’ayez, toi et lui, beaucoup d’ennuisb à ce sujet. [4] Mais qu’elle guérisse, c’est l’important et je le lui souhaite de tout mon cœur. Autre chose encore : je dois à la cuisinière 185 F. 20 et c’est aujourd’hui la blanchisseuse. Je ne te dis que ça. Maintenant c’est à toi à te tirer de là comme tu pourras. Moi je ne peux que t’aimer, souffrir et me taire sans murmures, bis, ter, quater et amen.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16401, f. 13
Transcription de Blandine Bourdy et Claire Josselin
a) « ravigotter ».
b) « ennui ».