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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 juillet [1849], mercredi matin, 7 h. ½

Bonjour, mon petit homme, bonjour, mon divin adoré, bonjour, que la santé, la joie, la gloire et le bonheur soient avec toi. Je n’espérais pas te voir hier au soir, aussi, je n’ai pas été désagréablement surprise en ne te voyant pas. Je venais d’être si heureuse dans notre petite promenade que je me sentais en fond de patience et de courage pour arriver jusqu’à aujourd’hui : bonjour, mon doux adoré, je baise tes beaux yeux fermés par le sommeil. Bonjour, dors bien, il a plu un peu cette nuit, ce qui a rafraîchia le temps et rend la température plus supportable aujourd’hui. Tu vois, mon petit homme, que j’en suis aux expédients avec mon papier ? Il faudra que tu tâches de m’en apporter bientôt car j’aurai bien vite épuisé les quelques grandes feuilles que j’ai dans mon buvard. Je t’y ferai penser tantôt si je peux. Une autre chose qui me tient plus au cœur, c’est l’affaire de ce pauvre homme à la Notre-Dame [1]. Je crains qu’on ne fasse une revue de l’exposition et qu’on oublie de parler de sa cathédrale, ce qui serait féroce après lui avoir donné un espoir sur lequel il ne comptait pas. Aussi, je vais te faire tout à l’heure une espèce de note à ce sujet que je te glisserai dans ce gribouillis pour que tu le donnes avec force recommandation à quelqu’un de l’Évènement  : et puis je t’aime et puis je te baise, et puis je t’adore !

Juliette

MVHP, Ms a8248
Transcription de Joëlle Roubine et Michèle Bertaux

a) « raffraîchi ».


18 juillet [1849], mercredi matin, 11 h.

Sais-tu qu’il faut que je me dépêche diantrement aujourd’hui, jour de la blanchisseuse, pour être prête à midi ½. Cependant, je le serai, coûte que coûte, car je ne suis pas d’humeur à perdre deux jours de suite l’occasion de t’accompagner jusqu’à ton assemblée. Mon Dieu que je serais heureuse d’assister à ton coup de boutoir, quand tu le donneras, au sujet de la statistique sur les pauvres gens morts de faim, de froid et de misère, à tous ces stupides représentants qui aimenta mieux nier le mal que d’y remédier et qui ont le front de mettre sur le compte de ta brillante imagination les faits les plus authentiques et les plus douloureux de cette époque. Malheureusement, cela arrivera dans le moment le plus inattendub et je ne pourrai pas jouir de la confusion de ces oies déplumées, à mon grand déplaisir et à mon grand regret. J’attends avec impatience que l’occasion se présente pour toi de la débarbouiller avec leur propre stupidité qui, pour n’être pas sale, tient la place de tes généreuses pensées et les empêche d’arriver tout de suite à un bon et efficace résultat. Cher adoré, je ne suis pas encore rentrée dans mon calme de Juju depuis ma fameuse colère de l’autre jour au sujet de ton admirable discours et des ineptes et violentes interruptions qui le [morcelaient  ?] [2]. Tant que tu ne les auras pas cinglés, je ne serai pas contente mais je ne t’en aimerai que mieux et que plus, avant comme après.

Juliette

MVHP, Ms a8249
Transcription de Joëlle Roubine et Michèle Bertaux

a) « aime ».
b) « inatendu ».

Notes

[1Le 5 juillet, Juliette Drouet s’est engagée à agir en faveur de Lelion, dont la maquette de la cathédrale de Notre-Dame est présentée depuis le 4 juin 1849 à l’Exposition nationale des produits de l’agriculture et de l’industrie

[2Le 9 juillet, Hugo a prononcé son grand discours sur la misère, chahuté sur les bancs de la droite.

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