Guernesey, 3 avril 1859, dimanche matin, 7 h. ½
Bonjour, mon doux bien-aimé ; bonjour, mon adorable petit homme ; bonjour avec tout ce que mon cœur a de meilleur, de plus tendre, de plus lumineux et de plus parfumé. Bonjour avec l’amour, le sourire, le bonheur et le baiser. Je t’aime. Je continue de m’énamourer du roman de votre Charlot, qui est bien votre bon, beau, brave et digne fils par le cœur, par le sang, par le talent et par la générosité d’âme. Je l’aime comme un portrait vivant très ressemblant de tout ce que j’aime en vous, mon adoré petit homme. Du reste, je ne m’étonne pas des rancunes haineuses de tous ces pauvres crapauds humains qui ne savent que se traîner dans la poussière ou croupir honteusement sous la pierre plate de la paresse contre ce brillant oiseau de paradis littéraire. C’est tout simple, mais le croassement de tous les QUESNARD de la création n’empêchea pas une seule note parlée du rossignol d’arriver aux oreilles du bon Dieu et des dilettantes de la pensée. En bon JUJU, cela veut dire que ton Charles a un grand et mérité succès, ce dont enragentb et verdissentc le gros Quesnard et Duverdier GRISÉ. Si cela ne vous satisfait pas, j’en suis fâchée et je vous flanque un tas de baisers à droite et à gauche pour vous apprendre à n’être pas de mon avis et de mon Français.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16380, f. 87
Transcription de Mélanie Leclère assistée de Florence Naugrette
a) « empêchent ».
b) « enrage ».
c) « verdisse ».