Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1872 > Juin > 5

5 juin 1872

Paris, 5 juin [18]72, mercredi matin, 7 h. 1/2

Bonjour, mon grand adoré, comment ta nuit ? Moi la mienne très bonne, mais la pauvre Suzanne n’a pas fermé l’œil à ce qu’il paraît. Je vais l’envoyer prendre un bain tout de suite, qui, en l’absence d’Émile Allix, lui a été commandé par le pharmacien. Je crois que le meilleur remède pour elle comme pour moi serait un mois ou deux de vrai repos. Seulement il est à craindre qu’il ne soit accordé que trop tard pour me tirer un renouveau de force et de courage. À ce propos, je trouve que tu as été imprudent hier de parler des avaries survenues à ta maison de Guernesey devant Guérin qui est en correspondance suivie avec son beau-père et chez lequel Mme Chenay passe une partie de son temps tous les jours. Ce que je t’en dis, c’est par amour de la confiance et de la vénération que tout le monde te donne et te doit. Cela fait, je rentre dans ma coquille d’où je ne laisse passer que mes cornes pour témoigner que la bête vit encore. Hélas, je vis encore trop pour n’être pas sensible à l’humiliation d’avoir dans ma parenté un jeune drôle [1] de l’espèce de celui qui a eu l’audace de t’écrire pour réclamer de toi un service, oubliant qu’il s’était déjà servi du même prétexte pour t’escroquer 150 F. il y a quelques années. Quelle tristesse pour l’âme de son pauvre grand-père si elle perçoit les choses de la terre. Quant à moi j’en suis profondément humiliée comme d’un affront personnel. J’espère que tu ne feras pas l’honneur de répondre à cet indigne porte-sabre, à moins que ce ne soit pour le traiter avec le mépris qu’il mérite. On peut pardonner une faute de jeunesse due à l’entraînement et à l’inexpérience, mais on ne doit que la sévérité à ceux qui font métier d’exploiter la pitié et la commisération des cœurs généreux et charitables comme le tien. Je suis confuse et malheureuse de toucher par le petit côté de la famille à un homme si peu avouable.

BnF, Mss, NAF 16393, f. 156
Transcription de Guy Rosa

Notes

[1À identifier.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne