5 avril 1870

Guernesey, 5 avril [18]70 , mardi matin, 6 h. ½

Bonjour, mon bien-aimé adoré, je te sourie et je te bénis. Puisses-tu avoir passé une bonne nuit malgré ton triste voisinage [1]. Quant à moi j’ai assez bien dormi et surtout, je t’aime, je t’aime, je t’aime. C’est certainement aujourd’hui que tu sauras le résultat du nouveau procès de ton fils. Quel qu’il soit il n’en peut pas être frappé autrement que dans son porte-monnaie, ce qui est bien quelque chose et même beaucoup trop. Heureusement voici le beau temps. Il pourra venir se ravitailler près de toi pendant que Petit Georges et Petite Jeanne ravitailleront le ROCHER. Je suis impatiente de voir tout ce petit monde peupler Hauteville House et saccager un peu Hauteville Féerie [2]. D’avance je leur livre tout, moi comprise, pieds et poings liés. En attendant je me prépare à faire de fortes promenades bras dessus, bras dessous, avec toi.

BnF, Mss, NAF 16391, f. 96

Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette