Guernesey, 12 novembre [18]68, jeudi matin, 7 h. ¾
Encore une très bonne nuit, mon cher bien-aimé, je me hâte de te le dire puisque tu as la bonté de t’y intéresser ; mais pour que j’en tire tout le bien qu’elle contient, il faut que la tienne soit meilleure encore et c’est ce que j’espère. Comment as-tu résolu ton problème d’ablution ce matin par ce temps diluvien ? As-tu donné la préférence au système Gribouille sur celui de la trappe [1] ? Pour moi, je préfère ni l’un ni l’autre car je les redoute tous les deux pour toi surtout en hiver. Cependant, et c’est ce qui me rassure, il ne t’est rien arrivé de mal jusqu’à présent et j’espère qu’il ne t’en arrivera jamais. Ce que tu n’échapperas pas probablement, c’est l’arrivée de M. Pyrkea aujourd’hui [2]. Ce n’est pas à moi de m’en plaindre après le service qu’il m’a rendu en me faisant retrouver le petit bijou de ma chère petite Claire [3]. Mais je sens le surcroît de fatigue que sa présence va te causer dans ce moment suprême où tu aurais tant besoin de tranquillité et de régularité dans ta vie et je m’en impatiente pour toi d’avance. Dans le cas où il viendrait aujourd’hui, dînera-t-il ce soir chez moi ? J’aurais besoin de le savoir et je te prie de me le dire quand tu viendras baigner tes chers yeux que j’adore.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 311
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « M. Pearke ».