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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 14 janvier [18]70, vendredi matin, 7 h. ¼

Petit bonjour, petit jour, grand amour, grand bonheur, tout cela je le mets sur vos pieds pour vous tenir chaud pendant que vous rêvez Duchesse [1] et démagogie. Comment la nuit ? Comment douleur ? Comment tout ? Moi j’ai assez bien dormi et je suis encore assez crâne ce matin. Je me hâte de faire mes quinze milles tours pour pouvoir lire le récit de l’assassinat du nommé PIERRE BONAPARTE sur cet infortuné Victor Noir [2] qui, peut-être, ne l’avait pas volé pour autres choses et pour d’autres. Mais enfin ce n’est pas une raison pour permettre à messieurs les princes ce droit expéditif et par trop moyen-âgeux de justice Haute et Basse et la pluie tombe toujours et l’empire suinte plus que jamais, c’est dégoûtant. Il faudra que je réponde le plus tôt possible à Madame Mie. Sa lettre si cordiale et si charmante pour moi l’exige absolument. La question est d’en trouver le temps... et le reste. Je n’ai que celui de t’aimer à fond de train et je t’adore toujours courant.

BnF, Mss, NAF 16391, f. 15

Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette

Notes

[1La Duchesse est le surnom que Juliette donne à l’amoureuse présumée de Kesler, qu’elle surnomme le Duc, et qui est au plus mal.

[2Le journaliste Victor Noir, de son vrai nom Yvan Salmon vient d’être assassiné par Pierre Bonaparte, cousin discret de Napoléon III, après la publication de deux articles où la famille Bonaparte est mise à mal.


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