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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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30 juillet [1840], jeudi après-midi, 3 h. ¾

Bonjour mon Toto adoré, bonjour mon chéri, bonjour mon oiseau, bonjour mon âme, bonjour le plus doux, le plus noble et le plus ravissant des hommes. Je t’aime. Claire n’est pas encore partie ni la petite Besancenot non plus car elle est chez moi en ce moment. Je pense que Lanvin ne tardera pas à la venir chercher. Je voudrais bien qu’elle pût voir son père car vraiment il finira par l’oublier tout à fait et par oublier aussi la pension [1] ce qui n’est pas très drôle. Il fait un temps noir et lourd qui agace et qui attriste. Si j’osais je serais très grinchue. Mais le souvenir de ton ineffable bonté et de ta ravissante douceur me fait honte et je chasse de toutes mes forces toutes les mauvaises pensées de mon cœur et de ma tête. Jour Toto. Outre le temps j’ai encore bien autre chose qui m’asticote, c’est la crainte que tu ne sois à Saint-Prix [2] aujourd’hui. Voilà le vrai sujet de ma maussaderie et de mon humeur noire. J’ai beau me raisonner je ne peux pas parvenir à prendre avec indifférence ton absence encore moins tes voyages à Saint-Prix. Je sais bien qu’il le faut. Je sais bien que c’est ton bonheur et ta joie, mais c’est peut-être à cause de toutes ces bonnes raisons que je supporte si difficilement tes petites excursions dans ce pays-là. Jour Toto, jour un petit o. J’espère que nos garçons [3] vont avoir des PHAMES prix ? Si j’étais leur professeur ils seraient bien sûrs de leur affaire. Malheureusement je ne lui suis pas et ils sont obligés de piocher avec ardeur pour obtenir de leurs farouches professeurs ce que la pauvre Juju leur donne sans y regarder. Dans tous les cas ça ne les empêche pas d’être les plus gentils et les plus aimés des garçons, voilà ce qui est sûr. Jour Toto, jour un petit o, je t’aime. Baise-moi, pardonne-moi d’être si jalouse et de t’aimer trop. Jour mon petit o. Papa est bien i.

Juliette

BnF, Mss, NAF, 16343, f. 63-64
Transcription de Chantal Brière

Notes

[1Juliette déplore fréquemment la désinvolture de James Pradier qui néglige l’entretien matériel de sa fille.

[2La famille Hugo s’est installée au château de la Terrasse à Saint-Prix pour l’été.

[3Il s’agit des deux fils Hugo.

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