Paris, 8 juin [18]74, lundi matin, 7 h. ½
Tout le monde sur le pont ce matin. Petit Georges demande deux œufs, Petite Jeanne sa soupe au lait, Mme Charles son potage gras, les servantes leur café, moi je demande des nouvelles de ta nuit et de ton cœur au citoyen saint Médard [1] lequel garde de Conrarta le silence prudent [2]. Je suis obligée de trouver en moi-même toutes sortes de bonnes raisons persuasives et tranquillisantes jusqu’au moment où je pourrai vérifier de visu et d’auditu dans quelle situation d’esprit et de cœur et de corps tu es aujourd’hui. En attendant, la pauvre Mariette souffre depuis hier d’un gros mal de gorge. Elle prétend que c’est un chaud-froid [3] ([illis.] de Julien) qu’elle a attrapéb en nettoyantc l’appartement d’Augias de la rue Drouot, ce qui n’est pas impossible. Je la réconforte de mon mieux et je lui conseille le repos et un bain de pied et des gargarismes répétés. Mais la pauvre fille n’en tient aucun compte jusqu’à présent. Peut-être auras-tu plus d’action sur elle. En attendant, je fais de mon amour pour toi ma panacée, ma santé, ma vie, ma joie et mon bonheur.
BnF, Mss, NAF 16395, f. 103
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette
a) « Conrard ».
b) « attrappé ».
c) « nétoyant ».