Guernesey, 21 mars 1868, samedi matin, 6 h. ¾
Bonjour, mon cher adoré, comment as-tu passé la nuit ? Je craignais pour toi la suite de l’agitation que tu avais éprouvée hier mais j’espère, en voyant ton signal matinal, qu’il n’en esta rien résulté de mauvais et que tu as bien dormi. Moi aussi j’ai très bien dormi et je t’aime avec tout ce que j’ai de meilleur en moi. Il serait bien à désirer qu’on te laisse tranquille au sujet de cette indomptable marée. Il me semble que le premier devoir et le premier besoin de tous ceux qui t’approchent devrait être de respecter ta tranquillité et la dignité de ta maison, même au prixb des mille tracasseries bêtes et grossières infligées par cette paysanne bigotec et bretonne [1]. J’en parle peut-être avec trop de facilité, moi qui suis hors de la portée de ses taquineries et de ses vexations, mais je sens que, par amour autant que par admiration et par vénération pour toi, tout me serait possible et même facile pour t’épargner un moment d’ennui ou de trouble car je mets mon bonheur et mon honneur à te servir à genoux. Je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 82
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « qu’il n’en n’est ».
b) « aux prix ».
c) « cette paysanne bigotte ».