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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Jersey, 12 décembre 1852, dimanche 9 h.

Bonjour, mon bien adoré petit homme, bonjour. J’espère que la tempête de cette nuit ne t’aura pas empêché de dormir. Je le désire ardemment car je sais par expérience combien sont longues et fatigantesa les nuits d’insomnie. Pour ma part j’en ai eu une cette nuit qui peut compter parmi les plus blanches. Aussi, mon pauvre petit bien-aimé, je ne suis bonne à rien ce matin, qu’à t’aimer. Cette aptitude ne dépend pas des incidents extérieurs, pas même de moi, car je t’aime comme je respire. Mon amour c’est ma vie. Aussi, mon cher petit homme, quels queb soient mes hauts et mes bas, ma misanthropie ou mon optimisme, je t’aime avant, pendant et après tout. Cela ne m’empêche pas de dire que je suis la plus mal partagée de vous tous, au physique, au moral et au SOCIAL. Je le dis parce que la vérité dans une tête bretonne est doublement têtue. Maintenant plaignez-vous de n’avoir pas de Téléquite [1] et de [illis.] de première qualité et à profusion, vous en avez le droit et je vous plains de tout mon cœur de Juju. Mais que vous prétendiez avoir le pas sur mon embêtement, voilà ce que je ne vous accorde pas, ce que je ne vous accorderai jamais, dussé-je me rallier subito à l’impérial Boustrapa et à son auguste famille.

BnF, Mss, NAF 16372, f. 257-258
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « fatiguantes »
b) « quelques »


Jersey, 12 décembre 1852, dimanche matin, 11 h.

Je te souris, mon Toto, quoique et surtout parce que je ne veux pas que tu me croies triste. Je t’aime, c’est tout ce qu’il me faut pour être heureuse. Je n’espère pas te voir beaucoup aujourd’hui à cause du peu de temps que tu as passé avec ta pauvre femme d’ici à demain [2]. J’en fais le sacrifice d’avance et de tout mon cœur dans la pensée que cela portera bonheur à la démarche qu’elle va faire auprès de son jeune fils. Je suis résignée aussi à ne pas te voir beaucoup tout le temps de son absence, parce que je sens qu’il faut que tu soisa avec ta fille le plus possible en l’absence de sa mère. Enfin, mon cher petit bien-aimé, je tâche de te rendre le plus possible toute ta liberté au moins pendant que ta femme sera à Paris pour n’avoir pas un seul remords sur la conscience de ce côté-là. Je tâcherai de combler le déficit de mon bonheur à force de t’aimer et de prier le bon Dieu de te rendre ton fils sain et sauf tout de suite. D’ici là, je serai très raisonnable, très douce et, si tu l’exiges, très GEAIE. En attendant je te baise de l’âme depuis la tête jusqu’aux pieds.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16372, f. 259-260
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « que tu te sois ».

Notes

[1Jeu de mots sur le nom de Téléki ? Dans une lettre précédente, Juliette se plaint des fréquentations féminines de Hugo auprès des exilés polonais et hongrois.

[2Adèle Hugo et Auguste Vacquerie partent à Paris le 13 décembre 1852 pour tenter de ramener François-Victor à la raison.

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