25 mai [1841], mardi matin, 10 h. ¾
Bonjour mon Toto bien-aimé, bonjour mon cher petit homme. J’aurais pu t’écrire plus tôta, mon adoré, si je l’avais fait dès que j’ai été réveillée, c’est-à-dire à quatre heures et demie du matin, mais outre que c’était de bonne heure, j’avais trop à faire à tenir tête à ma médecine qui m’a secouée d’importance [1]. J’ai la figure dans un état hideux, pleine d’affreux boutons et toute gonflée, si bien que la Juju serait horrible à voir. Cependant je me risque pour avoir le plaisir de vous embrasser. Je fais bon marché de ma tête pour faire plaisir à mon cœur. Ainsi venez, venez et nous verrons lequel des deux RECULERA. Jour Toto, jour.
J’ai envoyé les 25 F. aux Lanvinb, il paraît que la mère Lanvin est dans son lit et qu’elle souffre beaucoup. Pauvre femme et pauvres gens car il paraît que les yeux de la petite fille ne vont pas mieux et que le père est malade. Enfin cesc pauvres gens sont dignes de pitié. Je vais écrire à Claire pour lui envoyer ma bénédiction mais surtout pour lui dire que je serai sans faute à sa Première communion [2]. Je t’aime toi, je vous adore vous.
[Juliette ?]
BnF, Mss, NAF 16345, f. 187-188
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette
a) « plutôt ».
b) « Lanvins ».
c) « c’est ».
25 mai [1841], mardi après-midi, 3 h. ½
Par un hasard des plus malencontreux, ce jour que j’aurais dû passer en repos et tout entier consacré au travail de CABINET [3] a été rempli d’occupations toutes plus absurdes et plus fatigantesa les unes que les autres, aussi j’ai un mal de tête fou et une courbature soignée. Enfin grâce au ciel je vais avoir fini tout à l’heure. Le plus difficile était d’engrenerb [4] les caleçonsc, maintenant c’est fait [5]. Tu auras ton petit souper ce soir et puis nous aviserons à remédier à cette absurde bévue du marchand de décorations [6]. Pauvre bien-aimé, chaque fois que je te vois contrarié je ne sais où me fourrer, même quand ce n’est pas ma faute. Mais il aurait été plus qu’imprudent de confier le sort de tes décorations à l’intelligence de Suzanne, il vaut mieux, mon adoré, prendre une [peine ?] définitive que de subir une seconde bévue. D’ailleurs tu as encore un peu de temps devant toi et ce sera une occasion de me faire sortir et Dieu sait qu’elles ne sont pas trop fréquentes. Je n’ai pas encore eu de réponse de Mme Krafft pour la fameuse robe de mousseline de laine DE COTON [7]. J’espère pourtant qu’elle se décidera à m’en donner une quelconque.
Je t’aime mon Victor chéri, je t’adore mon petit bien-aimé. Je voudrais être à ce soir pour n’avoir plus la colique et pour te baiser comme je t’aime.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16345, f. 189-190
Transcription de Gwenaëlle Sifferlen assistée de Florence Naugrette
a) « fatiguantes ».
b) « engrené ».
c) « calçons ».