22 août [1836], lundi après-midi, 2 h.
Cher bien-aimé, comme on est en train chez moi de faire le ménage et que je ne veux pas attendre davantage pour t’écrire, je prends ce qui me reste de papier pour te dire : que je t’aime chaque jour plus, que je me repens des irritabilitésa de mon caractère qui empoisonnent les moments précieux que tu me donnes. Je te promets de m’observer le plus possible et de faire que les aspéritésb de ma nature disparaissent tous les jours. Quand j’aurai atteint cette perfection, j’espère que vous m’aurez conservé assez d’amour pour me récompenser de ma peine. Sans cela ce ne serait pas la peine de me réformer et j’aimerais mieux rester méchante et faire même des progrès en ce genre, pour me faire craindre et haïr autant que je haïrais moi-même le genre humain, vous y compris si vous veniez à cesser de m’aimer. Aussi si par bonheur tu reviens aujourd’hui tu verras que je ne te quitterai qu’à bonne enseigne.
Chère âme je t’aime, je te suis fidèle de corps, de pensée et d’âme.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16327, f. 258-259
Transcription de Nicole Savy
a) « irratabilitées ».
b) « aspéritées ».