Guernesey, 18 décembre 1855, mardi après-midi, 3 h.
Mon fripier m’a encore fait faux bonda aujourd’hui, mon cher petit homme, mais il a eu l’attention de me faire prévenir et de me donner pour excuse la nécessité de meubler aujourd’hui même un appartement de jeunes mariés. Il m’a fait dire en même temps qu’il serait chez moi sans faute vendredi à deux [heures ?]. Nous verrons s’il sera exact cette fois. En attendant, j’ai reçu une lettre des plus sympathiques pour les proscrits de la part de ce bon faïencier Worley [1] avec 12 F. pour la caisse de secours [2]. Je me suis faitb lire et traduire la lettre d’envoi par CAROLEINE [3] et la vieille demoiselle Le Boutillier et je t’assure que, malgré ces deux TRADITTORE, la lettre fait l’effet d’une des plus cordiales et des plus touchantes et des plus élevées qu’on puisse ÉCRIRE. J’espère que tu seras de mon avis, mon adoré bien-aimé, et que tu m’enseigneras comment il faut que je remercie dignement ce brave marchand, si désintéressé et si généreux. D’ici là, je t’aime avec un redoublement d’admiration et d’adoration, toi, le proscrit héroïque et sublime. Je t’attends avec toutes les plus pures tendresses de mon cœur. Je n’ai pas voulu sortir pour ne pas te manquer ce tantôt dans le cas où tu serais venu. Du reste je n’avais pas pu sortir ce matin assez tôt, ce qui fait que ma visite à Mme Florence est encore ajournée mais sans inconvénient je l’espère. Maintenant à bientôt, mon cher petit homme. Je t’attends de toute mon âme.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16376, f. 402-403
Transcription de Magali Vaugier assistée de Guy Rosa
a) « bon ».
b) « faite ».