Guernesey, 25 décembre 1861, 8 h. ½ du m[atin]
Bonjour, mon doux adoré, bonjour, santé, amour, joie et bonheur à toi, c’est le vœu constant et permanent de mon cœur et de mon âme. Comment vas-tu ce matin, mon cher petit homme ? As-tu passé une bonne nuit ? J’espère que oui car cela c’est bien dû, mon pauvre acharné piocheur.
Quant à moi qui n’ai pas le même droit que toi au repos et au bon sommeil, j’ai passé une nuit complètement blanche mais sans aucune espèce de souffrance que l’ennui de ne pas dormir. Du reste aucun pyrosis, aucun embarras d’estomac, mais aucun sommeil, voilà tout. Je ne t’en parle même que parce que tu l’exiges absolument, autrement je n’y ferais plus attention une fois la chose passée. Que tu sois en bonne santé et heureux, mon bien-aimé, et je me porterai bien et je serai heureuse et je t’aimerai comme si déjà je n’étais plus qu’une âme. En attendant je continue de t’aimer jusque dans la moëlle de mes os et je voudrais pouvoir t’aimer davantage encore, ce qui n’est pas possible puisque je t’aime de tout mon être à la fois et pour toute l’éternité. Sois heureux, mon cher adoré, pense à moi et aime-moi un peu. Je t’adore.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16382, f. 189
Transcription de Florence Naugrette