Guernesey, 13 mars [18]63, vendredi, 1 h. après midi
Je ne veux rien laisser de mon cœur arriéré, pendant notre bonne petite promenade de tantôt, c’est pourquoi, mon cher petit homme, je vous gribouille ma restitus séance tenante. J’espère que les giboulées voudront bien nous laisser le chemin libre d’ici à ce soir mais je m’en consolerais dans le cas contraire si tu voulais rester auprès de moi le temps que tu aurais donné à notre promenade car, en somme, être avec toi voilà pour moi le point capital. J’ai vu ta Marie [1] tout à l’heure, elle venait m’apporter une bouteille d’eau de menthe pour la bouche commandée à ton jardinier. Par la même occasion elle m’a parlé du frère de Virginie [2], il serait à désirer que ce pauvre homme entrât dans una hospice, ne fût-ce que pour être sûr d’avoir un abri et le pain de chaque jour à moins que tu n’en prennes la charge entièrement. Dans ce cas-là tu feras bien de prendre des mesures sérieuses pour que ton bienfait lui arrive directement et utilement. Du reste je te parle là de choses que je ne connais pas bien et à travers Marie. Ce que j’ai à te dire c’est que tu es mon bien-aimé vénéré, admiré et adoré.
J.
BnF, Mss, NAF, 16384, f. 68
Transcription de Chantal Brière
a) « une ».