13 décembre 1858

Guernesey, 13 décembre 1858, lundi matin, 9 h.

Bonjour, mon cher petit homme, bonjour, je t’aime. J’espère que de ton côté tu as passé une bonne nuit et que rien ne s’opposera aujourd’hui à ta santé et à ton bonheur. En attendant, je suis très contrariée de n’avoir pas pu parler à fond et utilement au docteur hier au soir sur ta santé à venir mais il est arrivé trop tard et Quesnard étant déjà là. Cependant, j’ai essayé de tester son opinion sans qu’il s’en doute sur la possibilité du retour de ta maladie. Il m’a répondu qu’il n’y avait aucune chance pour cela, qu’il ne pouvait pas affirmer absolument que cela ne pouvait pas se représenter mais que ce n’était pas dans les probabilités prévues qu’il y avait 99 à parier contre cent que ce cas ne se renouvellerait pas en ta personne. Ce sont ses propres expressions. Quant à lui, il n’avait aucune crainte à ce sujet. Tout cela dit avec l’assurance tranquille et la bonhomie modeste que tu lui connaissais. Cependant, mon adoré, je ne me trouve pas suffisamment rassurée par les 99 bonnes chances contre une mauvaise et tu ferais bien d’éclaircir cette question plus à fond avec toutes les autorités médicales de Londres et de Belgique mais encore et surtout de Paris. Pourquoi ne pas demander l’avis de M. Louis et de Cabarrus et de beaucoup d’autres dont les noms ne me reviennent pas. C’est là, je crois, ce qui serait raisonnable et décisif. Penses-y mon bien-aimé, et ne néglige rien pour affermir ta chère santé et la préserver de tout mal car elle est précieuse et utile à tout le monde et indispensable à moi.

Bnf, Mss, NAF 16379, f. 346
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette