Guernesey, 18 mai 1856, dimanche après-midi, 1 h.
Bonjour et pas un fichtre avec car vous ne le méritez pas. Je viens de voir le jeune Allix Allix [1] que sa sœur m’a détaché pour se dispenser de sa visite personnelle dont je la tiens quitte, d’ailleurs, sa petite importance étant donnée. Mais je ne prends pas mon parti aussi philosophiquement de la perte du canapé Louis XV et qui vous aurait été aussi bien qu’à moi. Aussi mordez-vous en les pouces jusqu’aux coudes et ce ne sera pas de trop pour l’occasion que vous m’avez fait manquer et je ne vous pardonnerai pas davantage. Chemin faisant, je me suis informée près du petit Allix à combien à peu près revenait le trajet d’ici à Paris. Il m’a dit approximativementa de [20 f ? à 50 ?] car il n’est pas venu directement ni par le chemin de fer. Du reste je crois Suzanne incapable de se priver de quoi que ce soit en route et de me compter un sou de plus que ce qu’elle aura consciencieusement dépensé pour être très bien partout. Voilà mon opinion. Cela étant, nous pouvons nous en rapporter à elle. Maintenant, mon affreux petit homme, je persiste plus que jamais dans mes rancuneux regrets et j’ai soif de votre sang. Tâchez de m’apporter votre TONNEAU pour que j’y puise. En attendant que j’en JOUE [2]. C’est à peine si dans ce gâchis hideux je sais ce que je dis tant je suis furieuse, exaspérée et hors de moi. Taisez-vous vilain monstre car je suis capable de vous aimer à mort.
Juliette
BnF, Mss, NAF, 16377, f. 150
Transcription de Chantal Brière
a) « aproximativement ».