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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Mardi 18 décembre [1838], après-midi, 2 h. ½

Je suis fâchée, mon cher petit homme d’être restée au lit si tard puisque cela vous a scandalisé. Je conçois que pour vous, mon pauvre bien-aimé, qui ne prenez de repos que juste ce qui faut pour ne pas mourir, vous soyez étonné de me trouver au lit à 1 h. de l’après midi. Si j’avais pu penser que je pouvais être utile à quelqu’un ou à quelque chose, mon Toto, tu peux être sûr que ma paresse aurait eu le dessous mais dans ma position ce que j’avais de mieux à faire était de penser à toi en me tournant et retournant sur mon oreiller. Au reste puisque cela te contrarie ou t’inquiète, je me lèverai avec l’AURORE tous les jours et je crois que vu la saison, je ne m’engage pas excessivement. Je suis très contente mon Toto que tu te sois décidé à souper avec moi car après un autre bonheur, le premier de tous, celui-là est le second et je connais rien qui vaille une minute passée avec toi, à plus forte raison une ou deux heures de la même vie ensemble. Je resterai donc chez moi ce soir et tous les autres soirs autant que tu voudras, seulement pour avoir la chance de te posséder une seconde plus tôt. Je vous aime mon Toto, vous devez en être bien trop sûr depuis le temps que je vous le prouve.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 248-249
Transcription de Sophie Gondolle assistée de Gérard Pouchain


18 décembre [1838], mardi soir, 5 h. ¾

Mr A. Joly est venu à 3 h. ¼ tantôt m’apporter sa carte en personne en insistant auprès de la bonne pour savoir si j’étais réellement sortie comme elle le lui affirmait. Je regrette de n’avoir pas été en état de le recevoir, peut-être aurais-je su quelque chose de positif sur ma position à ce théâtre. Je l’aurais d’ailleurs mis en demeure pour rompre mon engagement dans le cas où une considération étrangère aux engagements ordinaires de directeurs à acteurs aurait influéa sur le mien. Je suis donc très vexée de ne m’être pas trouvée en état de recevoir ce monsieur. Mon cher petit homme je t’aime et malgré les soupçons que tu apportes dans les actions les plus simples et les plus insignifiantes de ma vie, je t’aime. C’est aujourd’hui que Mme Krafft doit achever l’affaire Potel [1]. Peut-être viendra-t-elle ce soir et dans ce cas je ne suis pas fâchée de me trouver chez moi en même temps que je te donne une preuve très facile. Il est vrai que je ne tiens pas à aller chez Mme Pierceau malgré toi. Soir papa. Toto est bien i. Vive Toto. Il fait bien froid. Voici seulement que j’allume du feu chez moi mais je suis gelée d’importance ; pour la peine je vous aime mon petit homme, ne l’oubliez jamais.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 250-251
Transcription de Sophie Gondolle assistée de Gérard Pouchain

a) « influée ».

Notes

[1Juliette Drouet évoque depuis plusieurs jours la créance qui lui est réclamée par une marchande nommée Vatel, Votel, Fatel, Fotel ou Potel (la lecture diffère d’une lettre à l’autre).

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