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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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6 mai 1836

6 mai [1836], vendredi matin, 10 h.

Bonjour, mon cher petit homme. Comment vont vos petits bobos ce matin ? Il fait bien beau temps, aujourd’hui, vous pourrez donc barbotera à votre aise dans les rues de Paris, sans craindre de vous faire mouiller jusqu’aux os. Peut-être viendrez-vous me voir pour me consoler un peu de la journée et de la soirée d’hier que nous n’avons pas employéesb d’une façon bien intelligente, pour ne rien dire de plus.
Claire s’en est allée ce matin à 6 h. J’ai été quelque temps avant de me rendormir et puis enfin je viens d’être réveillée tout à l’heure par l’arrivée de la bonne qui m’apportait mon chapeau dont je ne suis pas très émerveillée car ce qui devait lui donner de l’originalité est complètement raté. Tel qu’il est, il plairait à tout le monde mais [illis.] ce … cette… qui fait que… au contraire… alors on est ébouriffé et on a le chapeau le plus étourdissant de la capitale.
Voilà, mon cher petit bijou, toutes les calamitésc qui m’assaillent quandd vous n’êtes pas auprès de moi.
Je vous désire avec bien de l’amour, mon cher petit bien-aimé. Je vous attends avec bien de l’impatience, mon chéri petit homme et je pense à vous sans interruption, mon adoré.
En attendant, je vous garde des bons gros baisers, des bonnes petites caresses et toutes sortes de bonnes chicoses bien charmantes.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16327, f. 19-20
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette

a) « barbotter ».
b) « emploiées ».
c) « calamitées ».
d) « quant ».


6 mai [1836], vendredi soir, 9 h.

Je ne suis pas encore couchée, mon cher adoré, je me sens un peu mieux que tout à l’heure. Encore un pas de plus et je serais tombée comme un vieux cheval de COUCOU [1].
Que je t’aime, mon cher bien-aimé, cela ne peut se comparer à rien, cela ne peut s’écrire dans aucune langue connue. C’est un degré qui n’a son synonyme que dans la langue du Ciel.
J’ai quelquefoisa avec toi des jalousies qui doivent te paraître des petitesses si tu ne comprends pas l’état toujours inquiet et jaloux de mon cœur. Ce soir, par exemple, j’ai eu un mouvement d’envie absurde et que je me suis reprochéb depuis comme une faiblesse indigne de moi. Mais que veux-tu, mon pauvre cher bijou, il n’y a pas d’autre faute que l’amour excessif que j’ai pour toi qui en est cause.
Venez bien vite, mon cher bijou et malgré l’énorme PIERRE qui nous BOUCHE le passage, nous saurons être heureux.
J’espère qu’on aura trouvé notre soupièrec un peu belle et pas trop chère. Convenez que sans moi vous n’auriez pas vu cette belle chose-là et que vous me devez bien de l’obligation de vous l’avoir dénichée.
Je t’aime, mon cher adoré, j’ai besoin de te voir. J’ai soif de tes baisers, j’ai faim de toute ta personne bien aiméed. Viens donc bien vite.

J.

BnF, Mss, NAF 16327, f. 21-22
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette

a) « quelques fois ».
b) « reprochée ».
c) « soupierre ».
d) « aimé ».

Notes

[1Coucou : Voiture hippomobile.

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