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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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22 mars 1873

Guernesey, 22 mars [18]73, samedi matin, 7h. ¾

Tu as bien fait, mon grand petit homme, de passer rapidement sur ton toit car il y avait de quoi être gelé rien qu’en y montrant le bout de ton nez. Quant à moi, je suis revenue me blottir dans mon lit d’où je te gribouille gaillardement mes tendres billevesées. J’espère que tu auras de bonnes nouvelles de ton cher groupe aujourd’hui. Mon cœur est toujours en quête de ce qui peut arriver à tout ce cher monde-là, ce qui fait que je t’en parle sans cesse quoi que je n’y puisse rien que l’aimer de toute mon âme en souhaitant de le voir bientôt ici avec toi. Pour cela il faut que le temps s’humanise un peu et que le soleil se mette enfin du côté du printemps. À force de l’espérer ce bon soleil, on finit par passer à l’état de belle Philis, ce qui est assez maussade.
Ce qui le serait moins ce serait l’acquittement du Rappel. Je voudrais déjà connaître le dénouement de cet inique et inepte procès. Malheureusement pour mon impatience nous ne le saurons pas avant huit jours d’après le renseignement de Mme Chenay. D’après la raison et l’équité il parait impossible de condamner cet honnête et vaillant journal. Mais l’expérience prouve que ce sont presque toujours pour la justice des raisons pour être condamné et jamais pour être acquitté. Et voilà pourquoi notre fille est muette [1] et que je n’ai aucune confiance dans la fameuse balance de la trafiquante Thémis. Et voilà pourquoi aussi je suis très contente que tu dédaignes de faire partie de cette honteuse et criminelle assemblée de Versailles. Voilà pourquoi encore je t’admire, je te vénère et je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 78
Transcription de Maggy Lecomte assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Citation de Sganarelle dans Le Médecin malgré lui (II, 4) : « Voilà justement ce qui fait que votre fille est muette. »

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