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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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19 mars 1873

Guernesey, 19 mars [18]73, mercredi matin, 8 h. 10 m[inutes]

Tu as encore passé une mauvaise nuit, mon pauvre bien-aimé, à en juger par l’heure où tu viens de te lever ? Il faudrait pouvoir prendre sur toi de travailler moins et de sortir plus de manière à ce que ton sommeil soit régulièrement bon toutes les nuits. Malheureusement cette chose si facile en apparence est presque impossible pour toi du moment où tu veux mener de front ton travail et toutes les choses de la vie à la fois. Cette tâche surhumaine ne peut s’accomplir qu’aux dépens de ton repos et en lui sacrifiant les plus douces joies de la famille. Cette abnégation est grande et sublime mais moi qui t’adore j’ai besoin de te sentir heureux et tu ne l’es pas, mon pauvre bien-aimé, ce n’est que trop facile à voir malgré ton stoïcisme de Saint et de martyr. Voilà pourquoi tout en t’admirant j’ai le cœur rempli de pitié, de vénération, d’amour et de tristesse quand je pense à toi c’est-à-dire toujours. J’espère pourtant que le retour du beau temps nous viendra en aide en guérissant ton cher fils [1] et en ramenant ici tes chers petits enfants avec leur mère. Dieu veuille que ce soit bientôt. En attendant je voudrais faire de mon sang, de mon cœur et de mon âme une sorte d’intérim du bonheur qui te manque. Si tu sors aujourd’hui et que tu veuilles bien m’emmener avec toi je serai prête et nous pourrons, chemin faisant, traiter la question Lanvin [2] qui se complique de jour en jour.
D’avance je crois qu’il ne faut rien précipiter et mettre beaucoup de prudence pour eux comme pour nous avant de prendre un parti définitif. Tu en jugeras toi-même au reste et ce que tu décideras aura force de loi pour moi.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 75
Transcription de Maggy Lecomte assistée de Florence Naugrette

Notes

[1François-Victor Hugo mourra à la fin de l’année d’une tuberculose rénale.

[2Blanche aimerait que sa mère la rejoigne à Guernesey.

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