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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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26 avril [1838], jeudi matin, 10 h. ½

Bonjour mon Toto bien aimé, bonjour. Lequel de nous deux est une bête, s’il vous plaît ? Répondez, je vous en prie. « Je vais revenir ; je prends mes clefs exprès, tu vas voir comme je vais revenir très tôt ; tu sais bien quand je te promets quelque chose … » ! Avouez que vous êtes un grand Blagueur et une grande bête aussi car pendant que vous restez chez vous, le temps du bonheur s’en va et ne reviendra plus jamais. Ah ! si c’était moi qui sois vous, vous en verriez de dures et je ne vous laisserais pas une seule nuit sans me voir. Malheureusement c’est tout le contraire. Il ne faut plus compter sur Jourdain aujourd’hui maintenant. C’est quand il lui plaira. J’attends la mère Lanvin ce matin, après quoi je resterai seule livrée à mes réflexions qui ne sont pas gaies. Jour Nono, jour mon petit o. Je voudrais baiser tes yeux pour les guérir et ta bouche pour la sentir. Je voudrais vous avoir à discrétion, vous verriez comme je ne vous lâcherais pas tout de suite. Jour vous, soir toi, petit bêta. Je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 80-81
Transcription de Mathieu Chadebec assisté de Gérard Pouchain


26 avril [1838], jeudi soir, 10 h. ¼

Cher petit homme, je vous aime, et je suis bien sûre cependant que vous êtes allé chez le Molé ce soir pour la fameuse breloque de Granier [1]. Je le crois d’honneur et je ne me trompe pas. Vous ne me l’avez pas dit par prudence et je ne vous en veux pas, surtout si vous avez le soin de fermer les yeux hermétiquement chaque fois que vous rencontrerez une beauté officielle ou autre. Je suis seule dans mon coin avec une chatte qui jette les hauts cris. Si toutes les chattes non satisfaites l’imitaient on ne s’entendrait pas dans Paris. Heureusement il y en a que ce malheur-là rend muettes…………………………………….a
Mme Lanvin est partie avec son mari, emportant les précieux zaillons. Vous seriez donc bien charmant si vous ne vous faisiez pas attendre trop longtemps. On m’a apporté le fameux couvre-pied qui a fait l’admiration de toutes les femmes présentes. Vous voyez bien que j’ai eu raison de l’acheter et que vous êtes une bête. Soir pa, soir To, soir tout ce que j’aime et que j’adore dans ce monde et dans l’autre.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 82-83
Transcription de Mathieu Chadebec assisté de Gérard Pouchain

a) Les points de suspension se poursuivent sur toute la ligne suivante [2].

Notes

[1Hugo s’emploie à faire obtenir la Légion d’Honneur à son ami Granier de Cassagnac. Ce sera chose faite le 10 juin 1838.

[2Dans Les Contemplations (1856), Hugo insérera à son tour une ligne de pointillés entre deux poèmes, pour indiquer la douleur indicible du deuil.

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