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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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24 février [1837], vendredi, midi ½

Bonjour monsieur Toto, je voudrais avoir un cœur de fer pour vous écrire encore plus durement que je ne le vais faire. Vous êtes un affreux bon homme, vous êtes, c’est-à-dire vous n’êtes plus pour moi qu’une effigie, un souvenir, vous n’existez plus que dans ma mémoire. Combien de temps pensez-vous que ça durera ? Je suis un peu souffrante, ce matin. J’avais fait faire des bons petits remèdes dont vous auriez eu votre part si vous étiez venu, mais je vais les prendre à moi toute seule et vous n’en aurez pas. Avez-vous été assez fat hier au soir, vous êtes vous assez fait prier pour me donner une simple petite image pas plus grande que rien du tout. Je tiens compte de toutes ces manières là et un jour viendra où je ferai payer tout cela en monnaie blanche.
Vieux bêtaa que vous êtes, vous ne savez pas ce que vous perdez tous les jours par votre faute. Je vous aime tous les jours davantage, c’est vrai, mais enfin cetb amour que vous ne recueillez pas n’en est pas moins perdu pour moi et pour vous, ce qui ne nous empêche pas de nous constituer la vie la plus bête du monde. Maintenant mon cher petit Toto, je prends la liberté de vous envoyer autant de baisers qu’il en peut tenir dans l’espace de ma rue à la vôtre, au risque d’asphyxierc tous les passantsd et les passantes. De plus je vous aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16329, f. 203-204
Transcription d’Érika Gomez assistée de Florence Naugrette

a) « bêtat ».
b) « c’est ».
c) « asphixier ».
d) « passans ».


24 février [1837], vendredi soir, 9 h.

Mon cher petit homme chéri, j’ai fait la couturière ce soir, j’ai taillé mes tabliers, il ne manquait que vous pour tailler la robe à fin que l’atelier soit au grand complet.
Je suis lasse de vous rabâcher toujours la même chose, je suis furieuse et indignée contre vous, votre conduite est ignoble, vos procédés sont TIDEUX [1], enfin vous méritez toutes sortes de châtiments exemplaires, et je me sens toute disposée à vous les infliger. Vraiment plus, je pense à vous et plus je suis outrée. Encore en peu et je fermerais ma lettre avec une grosse sottise pour compliment.
Jour, jour, onjour MĒNE, MĒNE, MĒNE, MĒNE, [MÉ, MÉ, MÉ, MÉ  ? MI, MI, MI, MI  ?] !!! Vous ne méritez que cela et encore...... c’est tout au plus. Je crois que je vais d’ici à très peu de jours, être une des signataires de la fameuse pétition adressée à MM. de la Chambre des Pairs et celle des Députés parce qu’enfin si la nature..... elle veut que j’aie dix enfants il est temps que je me mette en mesure pour fournir mon chiffre, tant pis pour ceux qui seront en retard. Vous mériteriez bien que je ne vous donne pas le plus petit mot d’amour, mais je vous aime, tenez et je vous baise de toutes mes forces.

BnF, Mss, NAF 16329, f. 205-206
Transcription d’Érika Gomez assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Jeu de mots volontaires avec la liaison.

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