Paris, 29 mai [18]72, mercredi matin, 8 h.
Bonjour, mon bien-aimé, j’espère que tu as eu une bonne nuit, digne de ta laborieuse journée et de ton adorable bonté répandue minute à minute sur tout le monde et dont j’ai eu hier la plus grande et la plus glorieuse part dans ta lettre à Louis [1]. Comment t’en remercier pour lui et pour moi ? Je ne trouve qu’un mot pour cela : je t’aime. Toute ma reconnaissance, toute ma fierté, toute ma modestie sont faites de ce mot-là : je t’aime. Mon admiration, ma vénération, mon adoration, c’est toujours : je t’aime, je t’aime, je t’aime. Dans les plus grandes comme dans les plus petites sensations de ma vie ce qui surgit avant tout de ma pensée et de mon cœur, c’est : je t’aime. Joie ou tristesse : je t’aime. Malheur ou bonheur : je t’aime. Mon pauvre Louis et sa charmante petite femme ont dû être atterrés de bonheur en recevant hier la lettre patente de noblesse que dans ta sublime bonté peur eux et pour moi tu leur as si généreusement octroyée. Si j’en juge d’après mon cœur qui s’en porte garant, ils sauront la mériter et la justifier par un dévouement et une reconnaissance éternels pour toi et les tiens.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 149
Transcription de Guy Rosa